Quelques réflexions suite à deux lectures : André Comte Sponville dans Challenges, et « Le capitalisme s’autodétruira » de P.Art
Pour commencer, André Comte Sponville (ACS) prend soin de bien nous montrer – sans y toucher, d’ailleurs – qu’il avait raison, bien avant que la crise éclate. Il avait déjà prévu que le capitalisme allait dans le mur. Trop fort…Mais intéressons nous à sa thèse, plus intéressante. Pour lui, le capitalisme est amoral, et non pas immoral. Rappelons tout de même que le capitalisme est le régime économique d’accumulation du capital. Cette dernière doit normalement avoir pour objectif de développer le niveau de richesse général. Mais, selon ACS, le capitalisme se nourrit des passions des agents économiques, et non de leurs intérêts. Sans régulation, le capitalisme produit donc des agents économiques aux objectifs démesurés, sans rapport avec une quelconque quantification réelle, et donc sans limites. Il n’est pas immoral (la morale ne s’accorde avec aucun objectif jugé bon/soutenable) mais amoral (pas de morale). La solution serait donc une plus grande régulation, par le biais du citoyen notamment, afin que ce dernier remette de la morale. Selon ACS, ce n’est pas au niveau international que les solutions sont à chercher, mais aux niveaux nationaux.
Pour séduisante qu’elle soit, cette thèse me paraît toutefois un peu trop laisser de côté un des piliers de la mondialisation : les multinationales. Comment peut-on proposer une solution à la crise sans parler de ces dernières ? Comment espérer quoi que ce soit de politique/démocratique sans parler de transformer le modèle de gouvernance des entreprises. Ce serait oublier là que le visage du capitalisme et les rapports de force qui le font prospérer/régresser. Ces rapports de forces ne sont plus les mêmes. Les Etats ont ouverts la boite de Pandore de la mondialisation avec la libéralisation des capitaux. Les multinationales, pour le meilleur (développement de plusieurs pays pauvres, vietnam, malaisie, par ex.) et pour le pire (utilisation de certains pays à des fins d’extorsion des ressources, redistribution minimale des richesses, pillage de l’environnement), ont en largement tiré parti. Elles pèsent aujourd’hui d’un poids certain sur la croissance économique de tous les pays, et surtout, sur la façon dont fonctionne le capitalisme. Il est inutile de chercher des réponses à la crise avec des solutions style « crise de 1929 » si on ne les adapte pas au contexte actuel. Ces solutions ne sont pas dénuées de sens, elles ne correspondent pas exactement au contexte, tout simplement.
Comment donc modifier le comportement des entreprises ? Les initiatives individuelles existent déjà. Ici une entreprise qui respecte des normes sociales élevées, une autre qui achète à un prix équitable, etc. Pourquoi ne pas généraliser ces comportements ? Les modes de gouvernance des entreprises seront certainement multiples, mais deux paraissent pour le moment en avance : les normes volontaires/obligatoires, et la transformation des modèles de management (par le biais de l’éducation, principalement). Le micro crédit doit également être une source de développement pour les populations pauvres, et ce modèle n’a pas les inconvénients du crédit à la consommation (taux usuriers…) ou des subprimes (montants trop élevés, donc forcément appuyés sur une architecture financière complexe). Pour mémoire, le rappel du principe qui fonde l’idée de M.Yunus, à la base du micro-crédit : « no loss, no dividend »…ça laisse rêveur, quand on voit le montant des dividendes qui sont distribués aux actionnaires (voir par exemple le dividende par action de British American Tobacco) !
Bon, pour le truc de Artus et Virard, ça attendra le prochain post.