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Une science lugubre ?

1 avril 2009

Quelques réflexions suite à deux lectures : André Comte Sponville dans Challenges, et « Le capitalisme s’autodétruira » de P.Art

imagesPour commencer, André Comte Sponville (ACS) prend soin de bien nous montrer – sans y toucher, d’ailleurs – qu’il avait raison, bien avant que la crise éclate. Il avait déjà prévu que le capitalisme allait dans le mur. Trop fort…Mais intéressons nous à sa thèse, plus intéressante. Pour lui, le capitalisme est amoral, et non pas immoral. Rappelons tout de même que le capitalisme est le régime économique d’accumulation du capital. Cette dernière doit normalement avoir pour objectif de développer le niveau de richesse général. Mais, selon ACS, le capitalisme se nourrit des passions des agents économiques, et non de leurs intérêts. Sans régulation, le capitalisme produit donc des agents économiques aux objectifs démesurés, sans rapport avec une quelconque quantification réelle, et donc sans limites. Il n’est pas immoral (la morale ne s’accorde avec aucun objectif jugé bon/soutenable) mais amoral (pas de morale). La solution serait donc une plus grande régulation, par le biais du citoyen notamment, afin que ce dernier remette de la morale. Selon ACS, ce n’est pas au niveau international que les solutions sont à chercher, mais aux niveaux nationaux.

Pour séduisante qu’elle soit, cette thèse me paraît toutefois un peu trop laisser de côté un des piliers de la mondialisation : les multinationales. Comment peut-on proposer une solution à la crise sans parler de ces dernières ? Comment espérer quoi que ce soit de politique/démocratique sans parler de transformer le modèle de gouvernance des entreprises. Ce serait oublier là que le visage du capitalisme et les rapports de force qui le font prospérer/régresser. Ces rapports de forces ne sont plus les mêmes. Les Etats ont ouverts la boite de Pandore de la mondialisation avec la libéralisation des capitaux. Les multinationales, pour le meilleur (développement de plusieurs pays pauvres, vietnam, malaisie, par ex.) et pour le pire (utilisation de certains pays à des fins d’extorsion des ressources, redistribution minimale des richesses, pillage de l’environnement), ont en largement tiré parti. Elles pèsent aujourd’hui d’un poids certain sur la croissance économique de tous les pays, et surtout, sur la façon dont fonctionne le capitalisme. Il est inutile de chercher des réponses à la crise avec des solutions style « crise de 1929 » si on ne les adapte pas au contexte actuel. Ces solutions ne sont pas dénuées de sens, elles ne correspondent pas exactement au contexte, tout simplement.

Comment donc modifier le comportement des entreprises ? Les initiatives individuelles existent déjà. Ici une entreprise qui respecte des normes sociales élevées, une autre qui achète à un prix équitable, etc. Pourquoi ne pas généraliser ces comportements ? Les modes de gouvernance des entreprises seront certainement multiples, mais deux paraissent pour le moment en avance : les normes volontaires/obligatoires, et la transformation des modèles de management (par le biais de l’éducation, principalement). Le micro crédit doit également être une source de développement pour les populations pauvres, et ce modèle n’a pas les inconvénients du crédit à la consommation (taux usuriers…) ou des subprimes (montants trop élevés, donc forcément appuyés sur une architecture financière complexe). Pour mémoire, le rappel du principe qui fonde l’idée de M.Yunus, à la base du micro-crédit : « no loss, no dividend »…ça laisse rêveur, quand on voit le montant des dividendes qui sont distribués aux actionnaires (voir par exemple le dividende par action de British American Tobacco) !

Bon, pour le truc de Artus et Virard, ça attendra le prochain post.

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14 mars 2009

Un changement de modèle économique dans le secteur bancaire ?

cr_dit_maroc

Sur les trente dernières années, les banques de détail avaient progressivement diversifiées leurs activités, sous l’effet de l’internationalisation des mouvements de capitaux (accords de Kingston, en Jamaïque, en 1976), et transformé leurs activités en rentrant en Bourse, en effectuant des rachats d’instituts financiers, ou tout au moins en développant ces activités. La crise a sans doute transformé ce modèle.

Il semblerait que devant le risque encourus sur les marchés financiers, les banques aient le choix entre deux positions pour redescendre à un niveau de risque acceptable : soit la fusion acquisition avec une autre banque de détail, soit le recentrage sur le cœur de métier. Les Caisses d’épargne et la Banque populaire ont choisi la première. Il est possible que le Crédit Agricole choisisse la deuxième. Dans le premier cas, la fusion est facile puisque les banques avaient plusieurs activités en commun, dont leur filiale Natixis, grand perdant de la crise financière. C’est sans doute la raison centrale (les pertes de Natixis) pour laquelle les deux concurrentes fusionnent. Dans le cas de la banque verte, c’est différent. Une fusion n’est pas envisageable pour le moment, puisque aucun rapprochement n’avait été effectué avant la crise, et actuellement, les banques sont relativement suspectes les unes vis-à-vis des autres sur l’opacité de leurs comptes. Par contre, les résultats du CA, qui font d’ailleurs chuter l’action en Bourse, proviennent des filiales étrangères (grecques, danoises et belges, je crois), lourdement déficitaires sur le précédent exercice. On pourrait donc avoir au sein du secteur de la banque de détail un recentrage progressif sur le cœur de métier, alors que depuis le milieu des années 1970, l’heure était plutôt à la diversification.

Signalons également que paradoxalement, dans la plupart des autres secteurs de l’économie, on pourrait par contre avoir le phénomène inverse, c’est à dire la diversification des activités alors que jusque là on avait plutôt observé un recentrage sur le cœur de métier. L’avantage de la diversification est simple : elle permet un effet de levier beaucoup plus important pour le financement des investissement, un effet d’une importance capitale lorsque la concurrence fait rage sur les marchés et que l’accès au crédit est coûteux. A suivre dans les prochains mois…

14 mars 2009

Explication de texte

Quelques éléments pour mieux comprendre le titre, et l’objectif de ce blog.

carlyleL’économie est la science de l’allocation des richesses. L’objectif des économistes est, en principe, d’allouer les richesses disponibles de la meilleure des manières. Le problème, mais c’est aussi ce qui rend l’économie intéressante, est que cette allocation optimale n’est pas la même selon les économistes a qui l’on s’adresse. Le citoyen pourrait donc penser qu’il est indispensable aujourd’hui de comprendre un minimum le fonctionnement de l’économie, afin de pouvoir donner son avis sur tel ou tel problème. C’est faux. En réalité, il a toujours été très important d’en comprendre les mécanismes, mais jamais indispensable.

Et pour cause. L’économie n’est pas la seule science qui gouverne les affaires. La science politique permet de les appréhender d’une toute autre manière et, à l’heure où l’Etat, ici et là, prend des décisions cruciales pour l’avenir de l’économie, la science politique permet sans aucun doute de comprendre certains mécanismes qui ne sont pas à la portée de l’économiste. Il en va de même pour les sciences sociales, l’histoire, ou la géographie. C’est par l’entrecroisement de toutes ces disciplines qu’il est possible d’arriver à une vision intéressante d’un problème.

Pour autant, comme je l’ai écrit plus haut, on ne peut nier que l’économie constitue un des piliers de la compréhension du monde dans lequel nous vivons actuellement. Il apparaît donc pertinent d’en dérouler quelques uns des mécanismes, parfois complexes (à tel point que même les économistes n’y comprennent plus rien). La compréhension, la discussion, sont donc les objectifs premiers de ce modeste blog. L’idée est de faire sortir l’économie du cliché de « science lugubre », terme qui lui est parfois associé depuis les écrits de l’historien Thomas Carlyle (en plus, faut reconnaître qu'il a la classe sur la photo, ci dessus). Celui-ci avait défini l’économie comme telle puisque qu’elle s’occupait principalement de la répartition des richesses (ce n’était donc pas une science aussi « noble » que la physique ou les mathématiques), et qu’elle voyait dans l’ordre économique de l’époque, fort inégalitaire, une logique implacable. Selon les économistes de l’époque, l’essor des classes laborieuses n’était ni possible ni souhaitable. Peut être ce blog pourra-t-il donc permettre de regarder la science économique comme une science qui justement définirait les contours d’une société future plus égalitaire, dont nous cherchons tous les formes aujourd’hui. Ou, plus modestement, d’en discuter (ce serait déjà pas mal...).

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Une science lugubre ?
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